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A la lecture
de l'Écho de Saïda, je n'ai pas pu résister à l'envie de vous
faire partager les "flashs" qui ont jailli de cette mer de souvenirs des
années glorieuses passées dans ce cher groupe complémentaire Jules Ferry.
Ce sont comme des bulles qui remontent à la surface d'une coupe de champagne;
elles ne seront jamais éventées mais, au contraire, elles pétilleront toujours
dans ma douce mémoire. Quand on parle du groupe complémentaire l'on se doit,
et à juste titre, d'évoquer les figures légendaires de MM. Féraud, Dahan,
Jenn, Koenig, Castel et Bénarouche; non pas que je sois misogyne, mais les
femmes profs étaient bien minoritaires pour ne pas dire absentes. C'est
à M. Féraud, que j'ai eu l'avantage d'apprécier au cours moyen 2ème
année, que je dois l'étincelle magique qui, dès mon jeune âge m'a
poussé vers l'enseignement. Ses dictées accompagnées des fameuses questions
de compréhension, grammaire, analyses logiques... résonnent encore en moi. En parlant de M. et Mme. Féraud, j'ai une pensée émue et très affectueuse pour ma première maîtresse, cette grande dame du cours préparatoire du groupe scolaire Berthelot qu'était Mme. Barritaud. M. Castel, lui m'inspirait la crainte et l'admiration à la fois, car quelle rigueur dans le travail, qualité si rare aujourd'hui. Je revois la figure colorée par notre généreux soleil, et un peu aussi par les bonnes cuvées que je ne citerai pas, de M. Jenn, la pipe en coin, calée entre deux molaires, et qu'il ne cessait de mâchonner et de rallumer. Souvent ses cours de sciences naturelles ou d'histoire-géographie du lundi matin se résumaient, quand, lui comme nous, nous nous laissions aller à la paresse, à des comptes-rendus animés de matchs de foot ou à des récits épiques de jeunesse de sa nostalgique Alsace. Sans oublier les fameux "un vingte... deux vingtes... " décrochés comme à la criée dans ce marché du savoir. De M. Dahan, je retiens surtout ce plaisir, cet enthousiasme à faire des mathématiques en jouant, gesticulant et bien sûr sifflotant sans dire un mot, persuadé qu' il était que nous avions tous compris. Et le plus fort c'est que c'était vrai... Les angles alternes-internes, adjacents ou opposés, les triangles semblables et le théorème de Thalès n'avaient plus aucun secret pour nous... J'ai gardé, grâce à lui, ce goût d'enseigner par le jeu. M. Koenig, lui aussi, me fait penser à cette honnêteté intellectuelle et cette rigueur qui marquaient cette génération de profs. Avec en prime, de merveilleux souvenirs des séances de travail manuel où, pour l'option prise au BEPC, nous apprenions la reliure, telle que seuls quelques vrais professionnels la pratiquent actuellement. Quant à M. Bénarouche, qui peut oublier ces moments magiques où grâce à son violon, un bourdon invisible et présent à la fois, voletait au-dessus de nos têtes pour finir en un tourbillon suicidaire dans ce feu qui l'attirait comme phalènes par la lampe. Hélas... parfois la dictée musicale ou le cours de chant ne pouvaient avoir lieu... alors, il claquait la porte... Une délégation, souvent menée par notre cher René Koubi ou notre génie Lalou, était dépêchée à son domicile et présentait les plus plates excuses de la classe. Et comme c'était un homme éminemment bon, il revenait aussi vite qu'il était parti. Nous nous donnions alors avec plus de ferveur à notre chorale, jumelée, pour les grandes occasions, à celle du groupe complémentaire filles. C'est ainsi qu'ensemble nous avions reçu un préfet Alsacien et nous lui avions entonné les célèbres morceaux: "En passant par la Lorraine..." et " Hantz... Hantz... lnchno Kalor ..." (l'orthographe doit être sûrement exacte). Tous ses hommes ont "fabriqué" la réputation méritée de ce cher groupe complémentaire. Cette réputation franchissait les sphères départementales et bien rares étaient les années où le taux de réussite de 75 pourcent au BEPC n'était pas dépassé. Rarement des mots ont aussi bien traduit des sentiments comme ceux de la si belle chanson de Serge Lama: "Ce sont mes maîtres et ce sont mes amis. Ceux qui ont su m'apprendre à être ce que, modestement, je suis". Texte de Roger Lascar |