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Pendant la deuxième guerre mondiale,
du 16 au 20 novembre 1944, je participais avec mon régiment le 8ème RTM
à la libération de Belfort. Au cours d'un combat de rue dans le centre-ville,
avec deux collègues de ma section, nous avons fait trois prisonniers Allemands.
ll y en eu bien d'autres, mais pour l'histoire, je ne parlerai que de ces
trois. Parmi eux se trouvait un jeune âgé de 18 ans maximum qui était blême
et tremblait de peur; je lui ai donné une cigarette et j'ai essayé de le
rassurer en lui disant qu'il n'avait rien à craindre. Quelques années plus
tard, j'ai compris la raison de cette peur intense. Nous avons laissé nos
prisonniers au camp de regroupement et nous sommes repartis vers la ville
et le fort du lion qui furent complètement libérés 2 jours plus tard. En
décembre 1945, enfin démobilisé et de retour à Saïda, je suis employé
comme chauffeur de camion à la Coopérative de Meunerie et Semoulerie. Quelques années passent, et à l'occasion d'un grand bal organisé au théâtre par l'Association des Médaillés Militaires, le Président de cette association, M. Vorontchouk, directeur à l'époque de la Coopérative de Meunerie, me demande d'aller chercher avec deux ouvriers au foyer de la caserne de la Légion, des tables et des chaises pour le théâtre. En arrivant au foyer de la Légion, je m'adresse au sous-officier qui devait me remettre le matériel et quelle ne fut pas ma surprise de reconnaître en ce dernier mon prisonnier de Belfort... Lui ne m'avait pas reconnu, mais après lui avoir rappelé les circonstances de son arrestation, il a réalisé que c'était moi qui lui avait offert une cigarette et qui l'avait rassuré. Nous nous sommes congratulés et c'est alors qu'il m'a dit avoir cru sa dernière heure arrivée quand on l'avait arrêté avec ses deux compagnons, leurs officiers leur ayant dit que s'ils étaient faits prisonniers par l'Armée d'Afrique ils auraient tous la tête coupée; j'ai enfin compris la peur de ce garçon lors de sa capture. Nous sommes restés bons amis, je le voyais le dimanche en ville et les derniers temps il fréquentait une jeune fille de Saida. Voilà l'histoire de mon prisonnier Allemand retrouvé à la Légion Etrangère à Saida. Le monde est petit... Texte de Raymond Florès |
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