Devoir de Mémoire

Mon Algérie... (1)

La recette qui servit à la République pour tenter de discréditer la monarchie est toujours de mise dans les livres de cuisine de la politique. Il fallait que tous les rois fussent mauvais pour que la République apparut vêtue de probité candide et de lin blanc. Le procédé qui tend à gommer 130 ans d’histoire de la France en Algérie ne procède pas d’un mécanisme différent; il fallait que tous les colons fussent d’abominables individus sans coeur pour que les décolonisateurs apparussent en justiciers. On évoque à peine, en les justifiant, les horreurs perpétrées par le FLN durant 8 ans sur des européens et des indigènes innocents. On monte en épingle quelques cas d’injustices flagrants, dont, au demeurant, tous les gens de bon sens s’indignaient. On rétrécit du général au particulier les méfaits des indépendantistes, et on élargit du particulier au général ceux des colonisateurs. Ainsi, on justifie l’horreur et on diabolise la réaction à cette horreur.

Mais ce processus, dûment planifié par les soi-disant historiens de la "décolonisation", se heurte à des évidences trop éclatantes. Il est, tout-de-même, difficile de faire porter le chapeau des lois édictées à Paris, à une minorité européenne, qui était traditionnellement "de gauche", et qui n’avait, dans les assemblées parisiennes, que très peu de représentants élus: la proportion même de chaque département français... Si donc les parlementaires métropolitains adoptaient ces lois, c’est qu’elles leur semblaient bonnes pour la France, dont les départements français d’Algérie faisaient partie intégrante. Et qu’on ne nous parle pas de "lobbies". Il est certain que nos parlementaires se sont agités comme grenouilles dans un bocal pour les intérêts de leurs mandants, c’était leur rôle. S’ils ont persuadé des parlementaires métropolitains honnêtes (à cette époque, ces termes eussent paru pléonastiques...) c’est que leurs arguments étaient valables.

Ils se heurtaient pourtant à de véritables lobbies, ceux des viticulteurs du midi, par exemple, dont il nous a été donné de lire la prose incendiaire... On a vu, ce que, depuis, l’idéologie a fait de la France. L’Histoire, quand elle n’est pas dénaturée, donne raison à ces hommes qui encourageaient, de chaque côté de la Méditerranée, une évolution progressive, trop lente aux yeux de nos démagogues. Le résultat est là: une Algérie économiquement sinistrée, dont les enfants ne rêvent que de venir vivre au pays de leurs oppresseurs, une France appauvrie, en dépit d’une "cagnotte" indûment volée dans les poches du cochon de payant, nos ports, ruinés, nos industries navales aussi, et des pans entiers de notre tissu économique s’effondrent ou sont mis sous assistance respiratoire de l’Etat ou de l’Etranger. Mais, périsse la France plutôt que les principes...

Alors, nous nous posons les mêmes questions que concernant nos rois: Si la colonisation était intrinsèquement mauvaise, que faire de tant d’hommes et de femmes qui ont donné leur travail et leur vie pour fertiliser ces pays? Que faire des soldats des trois grandes guerres et des généraux qui les conduisaient sur tous les continents? Que faire des médecins, des chercheurs qui ont trouvé les origines de la peste, du paludisme, éradiqué ces maladies et traqué la tuberculose, le trachome qui faisaient des ravages en Afrique et en Asie? Que faire des instituteurs qui enseignaient dans les bleds perdus et se faisaient assassiner par les fellaghas au nom d’un islam rétrograde alors qu’ils tiraient les enfants vers la liberté par l’instruction? Comment l’intolérance a-t-elle pris le masque du progrès pour enrôler tous ces "idiots utiles" (le terme est du FLN)? Que faire de tous ces morts et que faire des vivants, nous-mêmes, hélas... pesant comme des remords?

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