Vie de l'amicale
1994

Qu'il nous soit permis de vous rappeler que les tout derniers événements survenus en Algérie nous obligent à repenser plus que jamais à la réhabilitation de notre histoire. Parce que depuis trente ans, la période française en Algérie est présentée aux jeunes générations comme une longue période d'oppression, une suite de sursauts de révoltes légitimes et donc d'assassinats très compréhensibles. Parce que la colonisation est vue sous son côté le plus négatif et que seuls, ses détracteurs ont le plus souvent accès aux médias, notre passé devient un héritage lourd à assumer et bien décourageant pour nos successeurs. Alors avant qu'il ne soit trop tard, il faut se hâter d'écrire, de dire, de montrer, de crier à ceux qui nous succèdent ce qu'a été notre environnement perdu.

Au delà d'un discours nostalgique, leur montrer le courage, l'esprit d'entreprise de ces générations, souvent issues de la misère qui en un siècle, envers et contre tout, avaient bâti et conduit le pays vers la modernité et lui avaient donné des années heureuses quoi qu'on en dise. Pourquoi se hâter? parce que nous sommes les dernières générations parvenues à l'âge adulte sur notre terre natale et que, dans le même temps, tout est mis en oeuvre, sournoisement, pour gommer 130 ans de présence française. Avec la mutation de l'histoire, en oubliant volontairement les bienfaits de notre civilisation, pendant qu'en terre algérienne on profane allègrement nos cimetières jusqu'à leur disparition définitive.

Que restera-t-il de nous après toutes ces attaques? Une minorité essentiellement culturelle, dit-on pour nous consoler. Mais cette culture on la souhaite surtout du côté des cuisines: couscous, kémia... ou des réunions, qu'on veut bien qualifier de conviviales et chaleureuses. Soyons bien persuadés que notre survivance ne se fera pas qu'avec des spécialités culinaires. Nous devons compenser la terre que nous n'avons plus par l'écriture de son Histoire: "Le Mémorial de Saida" est un exemple que beaucoup de communes nous envient, et que vous voulez transmettre à vos enfants et petits-enfants.

Prenez vos plumes, secouez vos mémoires, ne craignez ni le style, ni "l"ortaugrafe"; la forme importe peu, c'est le fond qui compte, le souvenir qui intéresse. A l'aube du troisième millénaire où dominent individualisme, égoïsme et intolérance, vos souvenirs témoigneront que le travail difficile, la vie simple et souvent austère que nous menions, et bien plus encore nos anciens, n'étaient pas incompatible avec bonheur, joie de vivre, tolérance et solidarité.

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